PERSONNES RÉFUGIÉES VIOLÉES : UN ANGLE MORT, UNE CIBLE FACILE

Alors que 9 migrantes qui traversent la Méditerranée sur 10 sont victimes de viols (1), les agressions à caractère sexuel ne s’arrêtent pas une fois l’Europe atteinte. Zoom sur la culture du viol qui touche particulièrement les personnes exilées, une population souvent isolée et dominée socialement.

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3 min ⋅ 01/02/2025

Les sociétés européennes sont de plus en plus préoccupées par la question du viol, mais regardent les victimes comme un tout uniforme : pas de distinction, pas de spécificité, pas de fragilité chez certaines parties de la population. Les politiques publiques apportent des réponses globales pour endiguer la culture du viol sans jamais distinguer les victimes selon leur situation sociale. 

La ville de Lyon, par exemple, mène des politiques publiques afin de soutenir les associations qui aident et accompagnent les femmes victimes de violences sexistes et sexuelles ou de lutter contre le harcèlement de rue. Après 22h, les personnes menacées d’agressions à caractère sexuel peuvent sortir des bus du réseau TCL entre deux arrêts ; la ville de Lyon incite également les commerces à accueillir les personnes se sentant en danger via le dispositif « Angela ». Mais aucune de ces mesures ne vise spécifiquement la protection des personnes réfugiées.

Viol de personnes exilées : un phénomène quantifié

La vulnérabilité des personnes exilées du fait de leur précarité sociale et juridique est pourtant établie : une femme migrante a 18 fois de risque de se faire violer que la population française
L’Insee a aussi chiffré ce problème social. Selon l’institut de statistique, 16% des personnes étrangères de 18 à 75 ans déclarent avoir subi une ou plusieurs agressions à caractère sexuel en France. Le nombre chute à 7% pour la population française, sondée sur la même période entre 2017 et 2018. Notons que l’Insee considère les personnes étrangères étant résidentes en France et n’ayant pas la nationalité française. La définition prend ainsi en compte les touristes, les voyageur.euses d’affaires ou encore les étudiant.es internationaux.ales. Cette différence de 9 points s’explique probablement par le fait que les agresseurs et la culture du viol ont principalement pour cible des personnes isolées en situation de précarité. 

Un dépôt de plainte entravé

Porter plainte est un chemin de croix pour les personnes réfugiées : Problème de langue, absence de considération, difficulté liée à la situation administrative… De plus, une personne déplacée qui dénonce des agressions sexuelles commises dans le cadre d’un mariage ou d’un travail risque de perdre son statut de demandeur d’asile obtenu grâce au contrat de travail ou l’acte de mariage. Les Pays-Bas est d’ailleurs le pays de l’UE qui accorde le plus de titres de séjour aux exilées reconnues victimes de violence intraconjugales par un national selon ONU-Femmes.

De fortes disparités en Europe

La Convention d’Istanbul incite les États membres du Conseil de l’Europe à lutter contre les discriminations de genre et les violences domestiques. Elle soumet également aux pays européens d’accorder plus d’attention aux personnes déplacées
Le tissu associatif français contribue aussi à protéger les personnes réfugiées des violences sexuelles. En Allemagne, il existe des médiateur.ices pour écouter la parole de ces victimes. Mais certaines initiatives ne sont pas aussi efficaces dans d’autres pays : les centres de rétention pour migrants en Grèce sont jugés propices au développement de violences sexuelles. 

En finir avec une vision biaisée du viol

Si le débat public n’accorde pas une attention particulière aux populations déplacées dans la problématique des violences sexuelles, c’est aussi parce qu’il existe des clichées sur le viol. Selon les imaginaires collectifs, la victime de viols serait une jeune femme blanche et sexy. S’affranchir de cette idée reçue constitue une première étape vers la reconnaissance des personnes exilées comme cible privilégiée de la culture du viol.

(1) https://www.francetvinfo.fr/societe/immigration/selon-l-onu-90-des-migrantes-qui-ont-traverse-la-mediterranee-sont-victimes-de-viol_6951254.html 

Par Antonin Verdot


Pour aller plus loin sur notre dossier du mois consacré à La culture du viol, consultez les articles de nos rubriques Société et Culture sur notre blog.

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