L'AMBIGUÏTÉ DE LA POSITION EUROPÉENNE À TRAVERS L'OBJECTIF DU "FINANCEMENT NORD-SUD" : UN SUJET BRÛLANT DE LA COP 29
L’Europe, face à ses responsabilités dans le réchauffement climatique, se heurte aux réclamations de compensations financières des pays en développement qui en subissent les conséquences.
Les conflits géopolitiques et préoccupations énergétiques sont des enjeux et des défis climatiques qui concernent les États du monde entier. Ces défis, aujourd’hui incontournables, obligent chaque année la tenue de négociations et de réévaluations internationales à travers les Conferences Of the Parties (COP), qui visent à mettre en place des plans climatiques à l’échelle nationale. Cependant, le réchauffement climatique est d’ampleur internationale, d’où l’apparition de nouveaux enjeux qui diffèrent selon les ressources et l’impact environnemental de chaque pays. Ceci pose de nombreuses questions quant aux investissements et financements que chaque nation doit mener proportionnellement à ses capacités, notamment dans la distinction entre pays développés et pays en développement soit entre Nord et Sud.
Une inégale répartition des effets du réchauffement climatique
Les pays en développement (Sud), sont plus souvent victimes des aléas climatiques que les pays développés (Nord). Ce constat est basé sur trois critères : l’exposition, la vulnérabilité et la résilience théorisés par Damiens Altendorf, expert nature et climat. En effet, les pays de la bande tropicale sont plus exposés aux effets du changement climatique du fait de leur climat « plus extrême », s’observant par une plus grande intensité des différents aléas météorologiques tels que les sécheresses, les pluies… L’indice de vulnérabilité se mesure par le niveau de vie des habitants, ainsi que par la capacité des institutions étatiques à répondre aux catastrophes naturelles qui, dans le cas de ces pays, est bien moins efficace que pour les pays du Nord. Aussi, l’économie des pays du Sud est principalement issue de l’agriculture, de la pêche et d’autres secteurs similaires, ce qui la rend d’autant plus dépendante de la météo qui influe énormément sur leur production. De plus, la capacité de résilience de ces pays, soit leur capacité à rebondir après de telles catastrophes, est particulièrement faible, comme l’illustre la protection sociale qui ne couvre pas ce type de dommage à l’échelle des ménages.
La nécessité d’une entraide Nord-Sud dans le cadre de la justice climatique
La COP 29 de Bakou, en Azerbaïdjan, qui a lieu dans moins d’un mois, a été annoncée comme « COP des finances », à laquelle sont attendus des dispositifs visant à augmenter les investissements et à réformer l’ensemble du système financier.
Il y a un autre facteur essentiel à prendre en compte, c’est la notion de « justice » ou « dette climatique », sujette à de grandes tensions entre les pays du Nord et du Sud. Ainsi, il a été prouvé scientifiquement que les pays développés sont les principaux émetteurs de gaz à effet de serre, gaz responsable du réchauffement climatique, à cause de leurs modèles économique et industriel. Le postulat selon lequel ce sont majoritairement les pays en développement qui en subissent les effets et pousse les puissances du Nord à les aider économiquement notamment via des plans de financement.
D’autre part, les États développés incarnent des modèles de puissance économique mondiale, mais s’inscrivent aussi comme tête de file de la transition écologique, ce qui vient renforcer cette idée. D’ailleurs, le Président français Emmanuel Macron est devenu une figure clé de ces COP puisqu’il est internationalement reconnu comme un leader écologique, notamment grâce à son slogan « Make our Planet Great Again » en réponse à Donald Trump en 2017 explique le journaliste Romain David.
Quelques mois avant le démarrage de la COP 29 sur le climat, l’OCDE a annoncé, à Bonn, le bilan des financements apportés par les pays du Nord aux pays du Sud pour les aider à faire face au réchauffement climatique. Les pays développés se sont donc engagés à mobiliser 100 milliards de dollars par an afin de leur permettre de réduire leurs émissions et de faire face aux dérèglements climatiques. Cet objectif défini pendant la COP 15 à Copenhague n’a été appliqué qu’au bout de deux ans. Cela a ébranlé la confiance entre les pays des deux hémisphères et attisé les tensions géopolitiques et diplomatiques. Néanmoins, les fonds récoltés ont atteint 116 milliards de dollars en 2022, un bilan surestimé qui a généré une forte croissance dans les actions énergétiques et climatiques des pays du Sud.
Le plan de financement Nord-Sud : des enjeux diplomatiques conflictuels
Les financements climatiques sont des objets de tensions et empoisonnent les relations entre pays du Nord et pays du Sud, au point d’avoir paralysé la majorité des sujets à l’ordre du jour. La COP 29 va donc devenir le théâtre de confrontations politiques au sujet d’un nouveau plan de financement Nord-Sud.
Une nécessité climatique controversée par les défis conjoncturels actuels
L’Europe, dont la France via la figure de Stéphane Séjourné, souhaite assurer une continuité dans le plan de relance et de financement Nord-Sud. Plusieurs chiffres ont circulé pour ce nouvel objectif. « L'Inde notamment a soumis le chiffre de 1.000 milliards de dollars, invitant ainsi les autres pays à se positionner », indique Lola Vallejo, une conseillère spéciale climat au sein de de l’Institut du Développement Durable et des Relations Internationales, qui rappelle que « quand on parle de financement climat, ce sont majoritairement des aides qui vont des pays du Nord vers ceux du Sud ».
Dans ce conflit et ces désaccords financiers, les pays du Sud demandent que les financements proviennent majoritairement de dons. Or « beaucoup de financements sur l'atténuation du changement climatique sont effectués sous la forme de prêts, ce qui accroît les dettes des pays du Sud qui sont généralement déjà endettés », souligne Lola Vallejo.
Simon Stiell, secrétaire exécutif de la CCNUCC (Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques), a insisté sur l'importance de réaliser des progrès en matière de financements, considérés comme essentiels pour l'action climatique. Ces progrès financiers visent à servir des plans directeurs nationaux, des États du Sud en particulier, amenant à propulser les économies de ces sociétés, pouvant ainsi favoriser une plus grande résilience face aux changements climatiques.
Cependant, de nombreuses crises conjoncturelles mondiales freinent cet élan financier et divisent l’entente entre les pays européens et américains. Le conflit au Proche-Orient, la guerre en Ukraine ou le probable retour du climatosceptique Donald Trump à la tête de la plus grande puissance du monde, représentent des risques et des limites à la construction d’un compromis commun, qui tend à réduire les inégalités énergétiques, sociales et économiques entre l’hémisphère Nord et l’hémisphère Sud.
Par Nils GALES et Ulysse MARCILLAUD
Pour aller plus loin sur notre dossier du mois consacré à la COP 29, consultez les articles de nos rubriques Société et Relations Internationales sur notre blog.
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