PRÉSERVER L'EAU : UN ENJEU AUSSI EUROPÉEN

L’eau, ressource précieuse, fait face à de nombreux enjeux de qualité, consommation et préservation. Ces défis préoccupent de nombreux États, qui agissent en concert ou individuellement pour répondre à leurs propres intérêts et parfois aussi à ceux de la biodiversité.

MINERVIEWS
4 min ⋅ 01/07/2025

Le danger des polluants éternels sur la qualité de l’eau

En France, plus d’un tiers des masses d’eau de surface et près d’un quart des nappes phréatiques présentent une qualité chimique dégradée, selon le dernier bilan environnemental publié par le ministère de la Transition écologique. Ces chiffres traduisent une réalité alarmante : malgré des décennies de politiques publiques, les sources d’eau restent largement vulnérables aux pollutions agricoles ou industrielles.

Parmi les menaces les plus préoccupantes aujourd’hui figurent les PFAS, ou autrement dit les substances per- et polyfluoroalkylées, connues pour leur persistance dans l’environnement et les risques sanitaires irréversibles qu’ils représentent. Présents dans de nombreux produits, ces polluants éternels s’infiltrent durablement dans les sols, nappes et océans. Une vaste enquête menée en 2024 par la cellule investigation de Radio France et le réseau France Bleu révèle que 43 % des 89 échantillons d’eau du robinet testés en France métropolitaine contiennent des PFAS, dont plusieurs classés comme cancérogènes. Certaines villes comme Cognac (16), Saint-Symphorien-d’Ozon (69) ou Martres-Tolosane (31), dépassent même les seuils réglementaires qui entreront en vigueur le 1er janvier 2026. Cette même année, les tests d’eau du robinet quant à la présence de ces nuisibles deviendront obligatoires et systématiques, une mission qu’il incombera aux collectivités d’assurer sur tout le territoire.

Cette surveillance s’inscrit dans un cadre juridique renforcé mais, non moins précieux pour s’armer face au désastre climatique. De fait, les autorités sanitaires devront contrôler non seulement les 20 PFAS listés dans une directive européenne adoptée en décembre 2020 mais également d'autres composés dès lors qu’ils sont mesurables et jugés pertinents localement. Un bilan annuel des analyses devra être publié par chaque agence régionale de santé, complété par un rapport national du ministère de la Santé. En parallèle, l’État français s’est engagé à définir une trajectoire nationale de réduction des rejets industriels de PFAS dans l’eau, visant leur suppression complète d’ici cinq ans.

Longtemps ignorée, cette contamination suscite une réponse institutionnelle, et ce, à la suite de plusieurs contestations citoyennes et écologistes. Bien que cette mise à l’agenda politique puisse apaiser les esprits, elle en constitue un calendrier jugé tardif qui inquiète, d’autant que des cas de dépassements sont déjà documentés et se multiplient. Le danger est d’autant plus important que plusieurs pays européens ont déjà fixé des limitations plus strictes, laissant la France en décalage sur la question. Or, et c’est en cela que réside l’avenir hydrique, la régulation des PFAS implique une coordination renforcée entre États, secteurs industriels et société civile, à une échelle internationale.

Bouteilles en plastique : une pollution inégale dans toute l’Europe

À usage unique, les bouteilles en plastique sont un fléau pour l’environnement. Les bouteilles représentent près de 15 % des déchets plastiques en Europe. Les pays européens entretiennent des rapports différents face au recyclage du plastique. Alors que chaque citoyen.ne de l’UE a produit en moyenne 36 kg de déchets plastiques en 2021, 55% sont recyclés pour un.e Allemand.e, contre seulement 23,5 % en France.

Certains États européens ont adopté la pratique de la consigne pour les bouteilles plastiques. Cette pratique est ancrée dans la culture de l’Allemagne et des pays scandinaves depuis les années 1990. Or, en France, l’idée de généraliser la consigne et de lui donner un caractère obligatoire pour les enseignes est souvent mise sur la table sans jamais être appliquée concrètement. Le projet a été évoqué par Emmanuel Macron lors du sommet de Nice sur les océans. La France est d’ailleurs à l’initiative d’un texte négocié dans le cadre de cette conférence des Nations Unies et signé par près de 100 États dans le monde qui les contraint à réduire leur production de plastique. Les déchets plastiques polluent aussi la terre ferme, comme en Turquie, où l’UE en exporte souvent à ciel ouvert

Eau de mauvaise qualité : une consommation forcée ?

La qualité de l’eau du robinet est remise en cause en France, depuis que de nombreuses enquêtes ont démontré la présence de polluants éternels, à l’instar de la « cellule investigation » de Radio France en septembre 2024. Cette pollution ne concerne pas seulement la France mais l’Europe entière. Bien qu’elles polluent, les bouteilles en plastique sont perçues comme une alternative à l’eau du robinet. Or, cette même cellule d’investigation a révélé que les eaux en bouteille de Nestlé sont contaminées par bactéries et polluants. L’entreprise a également traité illégalement de l’eau présentée comme strictement issue de sources naturelles.

La préservation d’une ressource naturelle et son exploitation sont-ils deux objectifs conciliables?

L’eau est une ressource naturelle consommable par les hommes et un élément essentiel à la pérennité de nombreux écosystèmes aquatiques et marins. Plus de 70 % de la planète sont recouverts par les mers et océans. « L’océan est une source importante de biodiversité et joue un rôle vital dans le système climatique et le cycle de l’eau. », précise la Déclaration politique de la Conférence des Nations Unies sur l’Océan de 2022. Les défis de cet environnement naturel ont été débattu et argumentés lors de l’UNOC 3 qui s’est tenu du 9 au 13 juin 2025 à Nice. 

L’objectif initial de développement durable de l’UNOC soulève une importante contradiction, partagée par la communauté scientifique et par de nombreuses ONG. En effet, l’objectif n°14 de développement durable des Nations Unies entend conserver et exploiter de manière durable les océans, les mers et les ressources marines aux fins du développement durable. Une réflexion critique internationale s’impose alors autour des thématiques de protection et exploitation.

En effet, différentes délégations de l’Union européenne ont tenté tant bien que mal de se positionner en acteur clé, notamment en matière de décarbonation du transport maritime, de lutte contre les déchets plastiques ou encore sur les questions de la surpêche. La Commission européenne s'est fixée l'objectif de protéger 30 % des 11 millions de km2 de mers de l’UE d’ici 2030. Un but qu'elle compte atteindre en partie avec l'extension des zones Natura 2000 ou bien des Aires Marines Protégées, des sites naturels délimités où sont appliquées des stratégies de conservation et de protection des espèces.

Néanmoins cette volonté d’expansion des AMP et de régulation des activités d’exploitation de la faune et flore marine divise les gouvernements européens. Le Royaume-Uni souhaite interdire le chalutage de fond, une technique de pêche destructrice placée au cœur des discussions de l’UNOC, dans la moitié de ses aires marines protégées. Le gouvernement français quant à lui, a dévoilé son plan dédié à la protection des fonds marins et il ne promet de limiter le chalutage de fond que sur 4 % des eaux hexagonales. En France, les AMP recouvrent officiellement 33 % de la surface maritime française, mais seuls 1.6 % seraient réellement protégés, notamment de la pêche industrielle. Ces annonces sont jugées insuffisantes par les chercheurs et associations préoccupés par la préservation des océans. 

Les directives européennes concernant le secteur halieutique restent vagues. Chaque année, le Conseil de l’UE fixe les quotas de pêche par espèce et zone, répartis entre États membres. Cependant l’UE ne régule pas les différentes pratiques de pêche et « les États membres n’appliquent pas tous les mêmes contrôles et sanctions », ce qui compromet l’efficacité de ses compétences sur la conservation des ressources biologiques de la mer. 

Par GALES Nils, VERDOT Antonin & VERT Méline


Pour aller plus loin sur notre dossier du mois consacré à l’eau, consultez les articles de nos rubriques Culture et Société sur notre blog.

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